Mali : les mésaventures de Boubou Cissé, dernier vizir de l’ère IBK

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Accusé de complot contre l’État, plus particulièrement de complot de contrecoup d’Etat par les autorités de la transition militaire, l’ancien Premier ministre malien, Dr Boubou Cissé, aujourd’hui dans la clandestinité, soutient que ce sont ses ambitions présidentielles qui dérangent. Boubou Cissé s’est-il mis du mauvais côté du vent de l’histoire en devenant le Premier ministre d’Ibrahim Boubacar Keita ou est-il victime d’une notoriété dont lui-même ignore la dimension ? Pour sûr, le jeune technocrate BCBG n’est pas à l’abri, murmurent ses proches.
Membre de la Diaspora malienne, Boubou Cissé a fait très tôt le choix de se mettre au service de son pays. Alors qu’il était fonctionnaire à la Banque mondiale, IBK nouvellement élu, l’appelle en 2013, pour dit-il, rendre au Mali sa dignité perdue. Boubou Cissé rentre à Bamako avec femme et enfants. Il occupe d’abord le poste de ministre des Mines et de l’Industrie, puis celui de l’Économie et des Finance avant de devenir, en 2019, Premier ministre en succédant à Boubeye Maiga. Ce fils d’un Professeur d’université décédé très tôt et d’une mère institutrice, qui baignait déjà dans les milieux d’affaires des institutions internationales (Unicef, Banque mondiale) débarque donc dans les sables mouvants de la politique malienne. Humilié après le renversement de son mentor, Boubou Cissé est dans la clandestinité, après avoir échappé, selon ses proches, à une intrusion musclée d’éléments non identifiés, le 24 décembre, dans son domicile. Qui était l’ordonnateur de cette rocambolesque expédition? Selon plusieurs sources maliennes, suite au putsch, des attaques des résidences privées et des bâtiments publics ont été perpétrés. Pour la descente au domicile de Boubou, les autorités du pays affirment cependant n’être au courant de rien et assurent n’avoir envoyé aucune personne. Un contexte d’insécurité qui n’est pas sans rappeler celui qui précéda après le coup d’État du capitaine Sanogo en 2012 avec les arrestations et les agressions contre les anciens du régime d’Amadou Toumani Touré.
«Une perquisition se fait avec un mandat dûment attribué. C’est une descente chez moi, d’hommes qui étaient lourdement armés, au nombre de 5 et qui ont violenté les personnes qui se trouvaient chez moi”, relate le Premier ministre dans une interview à Deutsche Welle. Selon les proches de l’ancien PM, ces hommes armés et cagoulés se sont présentés à son domicile alors qu’il était parti faire une course. Les personnes qui étaient là, essentiellement du personnel de maison dont des femmes, ont été violentées. Les 5 individus, “habillés en civil et sans mandat des autorités”, précise une source proche du dossier, laisseront derrière eux une maison saccagée et des questions sans réponses. Selon le réquisitoire du procureur Kassogué, Dr Boubou Cissé est accusé de complot contre l’État, plus particulièrement de complot de contre-coup d’Etat contre les autorités de la transition militaire. « Mais ses avocats considèrent que le dossier est totalement vide de toute preuve à son encontre comme à celle des personnes incarcérées et que l’accuser est une aberration qui ne pourrait s’expliquer que par le caractère politique de cette affaire», a répondu un proche de Boubou Cissé. Pour les proches de l’ancien Premier Ministre, ce sont les règles qui régissent le cadre de la CEDEAO qui doivent toujours primer sur les décisions parfois arbitraires des autorités nationales. « Ceci implique qu’en cas de conflit entre une norme communautaire et une norme interne, l’application de la seconde devra être écartée au profit de la première », poursuivent-ils.
Malgré son influence, et sa proximité avec IBK, Boubou Cissé bénéficierait encore, assurent ses partisans, de la bonne image qu’il avait en accédant au poste de Premier.
Ministre. A son arrivée, il y a sept ans, l’ancien cadre de la Banque Mondiale avait suscité de l’espoir auprès de l’opinion qui le percevait comme un homme politique intelligent, expert, humble. Aujourd’hui encore, Boubou Cissé n’appartient à aucun parti politique et il n’en a pas lui-même. Cette indépendance dans un contexte politique où le jeu des partis et des appareils a conduit à une relative perte de confiance de l’opinion publique vis-à- vis de la chose politique semble être perçue comme une menace potentielle. Économiste de formation, Boubou Cissé est titulaire d’un diplôme (DEA) en économie du développement obtenu à l’université de Clermont Ferrand. Il travaille pour l’UNICEF à Abidjan, avant d’être recruté en 2004 par la Banque Mondiale en tant qu’économiste. Il passe 7 ans à Washington pour la Banque mondiale, 3 ans au Nigeria à Abuja, puis 1 an au Niger. Pour certains observateurs, le cas Boubou Cissé est aussi révélateur de la situation de la diaspora malienne qui s’intègre difficilement dans le jeu politique malienne. Alors que les ressources humaines disponibles dans le pays sont manquantes. Pour un pays où les citoyens aspirent à des élections crédibles et à un apaisement des tensions politiques, seul un processus politique libre et des élections inclusives, offrant l’égalité des chances à tous les Maliens, pourra remettre le pays sur les rails.
Source : Financial Afrik

 

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