En RDC, décès du leader politico-religieux Ne Muanda Nsemi

L’ancien député congolais, chef du mouvement politico-mystique des Bundu dia Kongo (BDK), est décédé ce 18 octobre à Kinshasa.

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Personnage énigmatique et tumultueux de l’espace public congolais, Zacharie Badiengila, alias « Ne Muanda Nsemi», (« l’Esprit créateur », en kikongo) s’est éteint ce mercredi 18 octobre à Kinshasa à l’âge 77 ans. L’information nous a été confirmée par ses proches.

Depuis qu’il avait été victime d’un AVC en juillet dernier, son état de santé était considéré comme préoccupant. Ne Muanda Nsemi est décédé au Centre hospitalier Nganda, où il était en soins intensifs – un établissement situé non loin de sa résidence qui sert également de quartier général des Bundu dia Kongo (BDK), mouvement politico-mystique qu’il avait fondé en 1969.

Discours extrémistes

Deux fois élu député national (en 2006 dans le territoire de Luozi, dans l’actuelle province du Kongo-Central et, en 2011, à Kinshasa/Funa), ce chimiste de formation restera une personnalité atypique qui a mêlé spiritualité (il se définissait comme héritier du prédicateur Simon Kimbangu) et revendications politiques, lesquelles reposaient essentiellement sur un séparatisme identitaire. Il avait d’ailleurs plusieurs fois réclamé l’autonomie du Kongo-Central.

Ses discours extrémistes lui avaient plusieurs fois valu les foudres du pouvoir. Comme dans les années 2000, quand, furieux de perdre l’élection au vice-gouvernorat de la province alors qu’il comptait parmi les favoris, Ne Muanda Nsemi appelle ses partisans à la révolte. Entre le 31 janvier et le 3 février 2007, de violents affrontements éclatent entre ses adeptes et les forces de l’ordre venues perquisitionner un bâtiment des BDK au Kongo-Central. Plus d’une centaine de personnes (adeptes ou simples passants) seront tuées, selon Human Rights Watch.

Évasion spectaculaire

En 2008, une nouvelle poussée de tension entre les BDK et le pouvoir fait plus de 200 morts – le chiffre a été établi par les enquêteurs de l’ONU. Le mouvement est par la suite interdit.

Alors qu’il est arrêté depuis le 3 mars 2017 pour des appels à l’insurrection et transféré à la prison de Makala, Ne Muanda Nsemi s’évade spectaculairement dans la nuit du 16 au 17 mai 2017, après qu’un commando composé d’adeptes (des Makesa), coiffés de leurs traditionnels foulards rouges sur la tête, a donné l’assaut à la prison. Avec lui, plusieurs centaines de détenus prennent la fuite.

Donné pour mort, il était ensuite réapparu, le 6 mai 2019, au siège du Conseil national de suivi de l’accord du 31 décembre 2016 (CNSA) aux côtés de son président, Joseph Olengankoy. Il ne s’était pas repenti pour autant puisque le 12 avril 2020, dans son bulletin d’information intitulé « Kongo Dieto », il s’était autoproclamé président de la « République fédérale du Kongo-Central » et avait de nouveau appelé ses partisans à se lever et chasser tous les ressortissants d’autres groupes ethniques de la province. De nouveau arrêté le 24 avril 2020 (33 de ses fidèles sont tués lors de l’intervention de la police), il est cette fois envoyé non pas à Makala, mais dans un centre psychiatrique.

Normalisation

Depuis, Ne Muanda Nsemi avait normalisé ses relations avec le pouvoir. Il avait même reçu, en novembre 2020, la visite à sa résidence de la première dame, Denise Nyakeru Tshisekedi, et en avait profité pour plaider la cause de ses partisans encore détenus.

En avril dernier, Ne Muanda Nsemi avait annoncé son ralliement à l’Union sacrée, la coalition formée autour de Félix Tshisekedi. Le mois suivant, c’est Augustin Kabuya, secrétaire général de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS, au pouvoir), qui lui avait rendu visite. Il était accompagné du directeur de cabinet adjoint de Félix Tshisekedi chargé des questions économiques et financières, André Wameso. Ne Muanda Nsemi était candidat à Matadi, chef-lieu du Kongo-Central, aux prochaines législatives.

Source : Jeune Afrique

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