Histoire: Discours du président Moussa Traoré sur l’Arrestation de ses compagnons Kissima Doukara, Karim Dembélé et Tiécoro Bagayoko

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Les Echos17 April, 2009
C’est par cette allocution prononcée au journal de 20 h 15 de Radio-Mali le 28 février 1978 que le colonel Moussa Traoré, président du Comité militaire de libération nationale (CMLN), a justifié l’arrestation de trois de ses ex-compagnons, pour haute trahison.

« Maliennes, Maliens, »

Vous savez qu’il est difficile d’honorer un serment surtout lorsque des intérêts particuliers et sordides sont en jeu.

Le serment de servir avec fidélité et honneur un peuple exige, à notre sens, un don de soi à ce peuple ; il exige, ce serment, que l’on place les intérêts supérieurs du peuple au-dessus de tout.

Il ne faut pas, ici, rien voiler ni rien taire. Mais je me contenterai de dire que si, pour certains, la sauvegarde des intérêts de notre peuple passe avant tout, pour d’autres, les intérêts particuliers demeurent fondamentaux. Le reste vous le savez.

Les seconds ne voyaient que la protection ou plus exactement la sauvegarde de leurs intérêts égoïstes et ils étaient pour cela prêts à tout.

Vous vous souviendrez, chers compatriotes, des rumeurs qui ont circulé après le remaniement du 7 janvier dernier. Vous vous souviendrez également du fameux tract intitulé : « Le Mali, un gouvernement sous l’autorité du CMLN/Une administration dirigée par l’Impératrice » et bien d’autres encore.

Tout ceci visait à saper le moral de notre peuple, à faire paraître le régime comme pourri et à s’emparer du pouvoir d’une manière ou d’une autre.

Pour éviter donc une éventuelle effusion de sang dont notre peuple n’a que faire, le Comité militaire de libération nationale a décidé d’arrêter les ex-lieutenants-colonels Kissima Doukara, Karim Dembélé et Tiécoro Bagayoko, respectivement ministre de la Défense, de l’Intérieur et de la Sécurité, ministre des Transports et des Travaux publics et directeur général des services de sécurité, pour haute trahison, diffusion de secrets d’Etat, mensonges et spéculations.

Nous allons immédiatement approfondir le contrôle de la gestion de leurs départements ministériels et services.

D’ores et déjà, soulignons en ce qui concerne l’ex-lieutenant-colonel Kissima Doukara, qu’il a été le président de la Commission nationale d’aide aux victimes de la sécheresse et qu’il a eu à ce titre, à utiliser de manière frauduleuse, les ressources provenant de la vente des céréales. C’est ainsi qu’au titre des transports, notre gouvernement doit à certains privés la bagatelle somme de plus de 600 millions de francs maliens.

Ajoutons à cela ses réalisations cossues qui dépassent largement le cadre de ses moyens et aussi et surtout la division qu’il a sciemment créée au sein de l’Armée en instituant un véritable îlot de prospérité dans un désert de misère. La discipline était bafouée et la hiérarchie méconnue.

Pour l’ex-lieutenant-colonel Tiécoro Bagayoko, il apparaît inutile d’épiloguer sur son cas tant ses agissements sont connus de tous. Il personnifiait la terreur et la calomnie.

En ce qui concerne enfin l’ex-lieutenant-colonel Karim Dembélé, je laisse le soin à vous, Maliennes et Maliens, de constater ce qu’il a pu réaliser en si peu de temps et à Bamako, et à Koutiala et à l’étranger.

De tels hommes, bien entendu, ne voyaient que leurs intérêts personnels et c’est pourquoi, l’Armée, qui ne pouvait plus laisser ces ivraies ternir son image de marque, a décidé de prendre toutes ses responsabilités face à notre peuple et face à l’Histoire.

C’est l’heure de la justice et de l’assainissement qui vient de sonner en même temps que l’heure de la compréhension, de la fraternité et du travail bien accompli.

Fini le règne des abus et de la terreur ; fini aussi celui de l’accaparement sordide et effréné.

Maliennes, Maliens,

C’est en défendant les intérêts supérieurs de notre peuple que l’Armée est intervenue dans la vie de notre pays le 19 novembre 1968 et c’est en défendant ces mêmes intérêts qu’elle vient encore une fois d’intervenir.

Elle sait qu’elle peut compter à tout moment sur votre détermination, votre disponibilité et votre courage.

Paysans, éleveurs, pêcheurs, artisans, commerçants, ouvriers et fonctionnaires, à quelque niveau que vous soyez, redoublez d’ardeur et d’effort pour la sauvegarde du prestige, de la liberté et de la dignité de notre pays et de notre peuple.

Vive la République !

(source : L’Essor du 1er mars 1978)

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