Ambassade du Mali à Brazzaville: 391 944 121 FCFA d’irrégularités financières, la Section des comptes de la Cour suprême

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La juridiction de Brazzaville abrite la troisième plus importante communauté malienne à l’étranger après celles d’Abidjan et de Paris. Pendant la période sous revue, l’Ambassade a délivré 29 159 cartes d’identité consulaires. Auparavant, elle n’avait pas encore fait l’objet de contrôle par le Bureau du Vérificateur Général. Les Ambassades du Mali sont des services extérieurs du Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale. Elles sont chargées de la mise en œuvre de la politique extérieure du Mali dans le pays d’accréditation.

L’Ambassadeur peut recevoir délégation de signature des Ministres dans l’Etat accréditaire. Il est aussi associé à la préparation et au déroulement des travaux de négociation de tout accord ou convention dont il est chargé de suivre l’application dans sa juridiction.

Les postes diplomatiques et consulaires du Mali reçoivent des fonds des Directions des Finances et du Matériel (DFM) du Ministère chargé des Affaires Etrangères pour leur fonctionnement, du Ministère de l’Education Nationale pour les bourses et du Ministère de la Santé concernant les évacuations sanitaires. Ces fonds leur sont transférés par la Paierie Générale du Trésor (PGT) de la Direction Nationale du Trésor et de la Comptabilité Publique (DNTCP), qui relève du Ministère de l’Économie et des Finances.

Aussi, les missions diplomatiques et consulaires collectent des recettes de chancellerie et les produits issus de la vente des timbres fiscaux.

Les montants totaux des recettes et des dépenses sur la période sous revue s’élèvent respectivement à 1 808 619 075 FCFA et à 1 689 662 224 FCFA. Les recettes se décomposent en transferts de fonds du Trésor Public pour 1 534 571 925 FCFA et en recettes propres pour 274 047 150 FCFA.

Les constatations et recommandations issues de la vérification sont relatives aux irrégularités administratives et financières.

IRREGULARITES ADMINISTRATIVES :

Elles relèvent des dysfonctionnements du contrôle interne.

Le Ministre chargé des Affaires Étrangères et celui chargé des Finances n’ont pas pris d’arrêté conjoint fixant le plafond des avantages accordés au personnel diplomatique

L’article 9 du Décret n°96-044/P-RM du 08 février 1996, modifié, fixant les avantages accordés au personnel diplomatique, administratif et technique dans les missions diplomatiques et consulaires de la République du Mali précise : “Le budget d’État prend en charge les frais de location, d’ameublement, d’abonnement et de consommation individuelle d’eau, de gaz de ville, d’électricité et de chauffage dans la limite d’un plafond qui sera fixé par arrêté conjoint du Ministre chargé des Affaires Étrangères et du Ministre chargé des Finances”.

Elle a constaté que le Ministre chargé des Affaires Étrangères et celui chargé des Finances n’ont pas pris l’arrêté d’application du Décret n°96-044/P-RM du 08 février 1996, modifié, pour fixer le plafond des dépenses relatives aux frais de location, d’ameublement, d’abonnement et de consommation individuelle d’eau, de gaz de ville, d’électricité et de chauffage. En effet, l’Ambassade a effectué ces dépenses sans limitation. L’absence d’arrêté conjoint fixant le plafond des dépenses relatives au logement et accessoires des diplomates ne permet pas de maitriser les montants desdites dépenses.

Le Secrétaire Agent Comptable (SAC) ne tient pas des registres comptables.

La mission a constaté que le Secrétaire Agent Comptable ne tient pas les registres comptables ci-après : le Calepin de caisse, le Registre des rejets comptables, le Registre des droits des créanciers, le Livre journal des commandes, le Livre journal des matériels et matières, le Compte de gestion des matériels et matières.

Le SAC ne respecte pas le montant plafond de disponibilités autorisé à être détenu en espèces

La mission a constaté à l’issue du comptage des numéraires, que le SAC détient dans sa caisse un montant supérieur au plafond autorisé. En effet, l’arrêté de caisse a révélé un montant de 623 600 FCFA supérieur au plafond de 250 000 FCFA autorisé.

Le non-respect du plafond de détention en espèces peut aboutir à des risques de soustraction de fonds.

L’Ambassadeur n’a pas établi des contrats de travail conformes à la convention d’établissement

Elle a constaté que l’Ambassadeur n’a pas rendu les contrats de travail conformes à la convention d’établissement. En effet, les 13 contrats repris en 2017, après l’entrée en vigueur de la convention, ne font pas mention de certains éléments substantiels comme la catégorie et l’échelon, indiqués dans ladite convention.

L’absence de ces éléments dans le contrat de travail rend difficile le classement des agents sur la grille salariale et expose l’Ambassade au paiement d’éventuels dommages et intérêts en cas de litige.

Le Secrétaire Agent Comptable ne respecte pas le plafond de paiement en espèces des salaires

L’Arrêté n°93-2693/MEF.PLAN-CAB du 14 mai 1993 réglementant le paiement des traitements et salaires des agents des services publics précise en son article 1er : ” Les traitements et salaires des agents titulaires ou non titulaires des services publics : Etat, collectivités locales, établissements publics sont obligatoirement payés par virement sur un compte ouvert dans un établissement bancaire ou assimilé lorsque leur montant net mensuel excède 50 000 FCFA (cinquante mille francs CFA)”.

Elle a constaté que le SAC paye les salaires du personnel en espèces, hormis celui de l’Ambassadeur, en violation de l’arrêté ci-dessus visé alors que leurs salaires excèdent 50 000 FCFA.

L’Ambassade ne procède pas à la mise en

concurrence des fournisseurs

Elle a constaté que les opérations d’acquisition de biens et services ont été effectuées sans mise en concurrence d’au moins trois fournisseurs contrairement aux dispositions légales et règlementaires. Le montant total ainsi engagé s’élève à 6 424 500 FCFA.

Le Secrétaire Agent Comptable ne tient pas des documents de la comptabilité-matières

Il ressort de ces travaux que hormis la ” fiche détenteur “, le SAC ne tient aucun document de la comptabilité-matières. En effet, de l’entrée du matériel dans le patrimoine de l’Ambassade à sa sortie, en passant par les différents mouvements (affectation, mutation et réforme), rien n’est répertorié par un quelconque document de la comptabilité-matières. Certains matériels acquis n’apparaissent nulle part dans la comptabilité-matières

IRREGULARITES FINANCIERES

Le montant total des irrégularités financières ci-dessous s’élève à 391 944 121 FCFA. Le Chef de mission a consommé des recettes propres sans aucune autorisation du Payeur Général du Trésor, contrairement à la réglementation

Le montant des recettes autoconsommées sans autorisation s’élève, sur la période sous revue à 216 490 150 FCFA.

Le Secrétaire Agent Comptable a minoré des recettes

propres de l’Ambassade

Il a doublement payé les frais de location du mois de juin 2017 de l’appartement de l’Ambassadeur. En effet, il a payé la Facture n°020/17 en date du 29 mars 2017 relative aux loyers des mois d’avril à juin pour un montant de 4 500 000 FCFA soit 1 500 000 FCFA par mois. De même, il a payé la Facture n°035/17 du 30 juin 2017 relative au loyer du même mois de juin, d’où un double payement pour un montant de 1 500 000 FCFA.

Le Secrétaire Agent Comptable a accepté des pièces justificatives irrégulières d’indemnités de déplacement et de mission

Le montant total des dépenses relatives aux indemnités de déplacement et de mission non justifiées par l’ordre de mission dûment visé s’élève à 1 478 500 FCFA.

Transmission et dénonciation de faits par le vérificateur général au président de la Section des comptes de la Cour suprême et au procureur chargé du Pôle économique et financier

Ces dénonciations sont relatives à l’autoconsommation des recettes propres sans autorisation du Payeur Général du Trésor pour un montant total de 216 490 150 FCFA ; la minoration des recettes de chancellerie de l’Ambassade pour un montant total de 3 660 000 FCFA ; la minoration des recettes des timbres fiscaux pour un montant de

15 538 850 FCFA ; paiement des salaires et autres avantages indus à des diplomates pour un montant total de 139 563 172 FCFA ; non-remboursement des frais médicaux pour un montant total de 1 113 449 FCFA ; la non-récupération des cautions des logements pour un montant total de 12 600 000 FCFA ; double paiement d’un loyer pour un montant de 1 500 000 FCFA ; la non-justification des indemnités de déplacement et de mission pour un montant total de 1 478 500 FCFA.     

Amadou Bamba NIANG / Aujourd’hui Mali

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